Le Contr’Un

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Le Contr’Un

Considérations sur les assemblées

« D’avoir plusieurs seigneurs aucun bien je n’y voi : 
Qu’un, sans plus, soit le maître et qu’un seul soit le roi. »

C’est avec ces vers d’Homère que commence l’un des classiques les plus connus de la pensée antiautoritaire, le Discours de la servitude volontaire, de La Boétie, une étude pionnière sur les raisons qui amènent l’être humain à la renonciation à sa propre liberté pour se soumettre à des décisions prises par autrui. Le titre original de l’œuvre est moins connu : le Contr’Un. Le fait d’avoir été écrit vers la moitié du XVIe siècle a permis à de nombreux interprètes de limiter la portée historique de cette analyse et de sa signification, tout en en désamorçant sa charge explosive.

Quelque chose qui manque

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Quelque chose qui manque

Il y a quelques décennies, lors des désordres qui ont éclaté à Brixton en Angleterre, il est arrivé à certains compagnons de se retrouver au milieu de la tempête. Les affrontements étaient en train de se dérouler juste devant chez eux. Que pouvaient-ils faire d'autre, sinon descendre dans la rue pour se joindre aux révoltés ? C'est ce qu'ils ont essayé de faire, sans y parvenir. De fait, les révoltés les ont repoussés plutôt brutalement. Des anarchistes ? Et c'est qui, ça ? Qu'est-ce qu'ils veulent ? Ils ne sont pas des nôtres, ils ne parlent pas la même langue que nous, ils n'ont pas notre couleur de peau, ils n'ont pas des vêtements comme les nôtres, ils n'ont pas les mêmes codes de comportement que nous. Face à l'explosion d'émeutes aveugles et inconsidérées, il ne suffit pas d'être anarchistes pour rester en première ligne.
Il y a quelques semaines, lors d'une protestation d'ouvriers devant le Parlement dans une ville européenne, il est venu à l'esprit de certains compagnons de se rendre sur place. La protestation était précisément en train de se dérouler dans leur ville. Que pouvaient-ils faire d'autre, sinon descendre dans la rue pour se joindre aux manifestants ?

L’imprévu

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L’imprévu

Parfois, on en vient à penser qu’il est vraiment dommage que la révolution de “référence” pour les anarchistes soit celle survenue en Espagne en 1936. Une révolution née comme réaction rageuse, déterminée et consciente à un coup d’Etat. Une révolution qui pouvait compter sur une grande organisation anarchiste spécifique, qui a son tour influençait le plus grand syndicat du pays. Une révolution qui a vu des anarchistes entrer au gouvernement et accepter la militarisation au nom de l’urgence des choses, des nécessités tactiques du moment. Trois éléments, contenus dans une seule expérience qui, à force de passer pour un modèle historique, ont enraciné dans l’esprit de nombreux anarchistes l’idée que la révolution a besoin : a) d’une soi-disant motivation idéale d’ordre supérieur ; b) d’un appui populaire quantitativement significatif ; c) d’un opportunisme agile et attentif, prêt à se débarrasser de n’importe quel principe jugé trop encombrant. Un vrai malheur, car là où ces trois éléments sont absents, ou même si on n’en refuse un seul, il ne reste pour beaucoup que la résignation ou la lutte entendue comme duel privé. Et pourtant...

Res communis ou res nullius ?

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Res communis ou res nullius ?

C’est désormais devenu un refrain récurrent, inévitable, quasi obsessionnel. Il pointe son nez dans chaque discours, il prend place dans tous les débats, il est conjugué à toutes les sauces. Partout où il y a une situation de lutte, une lueur de dissensus, une étincelle de conflit, vous pouvez être certains que quelqu’un commencera à vous parler de bien commun. Au début, ce mot réexhumé (et d’origine catholique, comme on l’a déjà vu) ne servait qu’à indiquer un élément naturel comme l’eau. Puis, lorsque quelques uns se sont rendus compte combien ce refrain fonctionnait, à quel point il était en mesure d’attirer l’attention et de grimper au hit parade du consensus politique, tout s’est rapidement transformé en « bien commun ». Pour le défendre, des comités et des listes électorales citoyennes prolifèrent un peu partout.

Entends-tu ?

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Entends-tu ?

Il n’existe pas d’échappatoire à la réalité. Cette réalité totale qui se prétend définitive, et qui tente d’empêcher tout écart et toute déviation du sens unique imposé par le pouvoir politique et économique. Cette réalité qui ramène toute perspective aux tristes paraboles de l’augmentation des budgets ou des sondages d’opinion. Cette réalité qui a infesté chaque recoin de la vie avec des checkpoints et des caméras de vidéosurveillance, des sirènes d’alarme et des limites de sécurité. Mais ce monde misérable dont on ne peut s’évader est en train de se décomposer sous nos yeux. Et quand l’air se remplit de tensions, il suffit d’une petite étincelle pour provoquer une explosion.

Avec les pieds...

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Avec les pieds bien appuyés sur les nuages

Lorsque souffle la tempête, certains vont de l’avant avec courage et passion, soutenus par la force de leurs propre idées. Devant eux s’annonce un monde sans exploités ni exploiteurs, sans cages physiques ni morales, et cette liberté, ils ne la souhaitent pas seulement pour eux, mais aussi pour tous ceux qui, les yeux ouverts et avec les pieds bien sur terre, se rendent compte de l’esclavage quotidien qui les enserre. Ce sont les anarchistes, souvent dénigrés et emprisonnés ; ils désirent ici et maintenant l’utopie d’une vie digne d’être vécue.

Kick It Till It Breaks

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Kick It Till It Breaks

Une introduction à "Angry Brigade"

Ravage Èditions

Dans la nuit du 12 janvier 1971, la couverture du Times est explicite : « Deux bombes ravagent la maison de Carr un jour de protestation ». Robert Carr était à l’époque le ministre de l’emploi du gouvernement Heath, conservateur, fraîchement élu. Il était responsable du projet de loi sur les Relations Industrielles, adopté un peu plus tôt dans la journée, et provoquant de nombreuses manifestations ouvrières. Cette attaque directe sera revendiquée par un groupe nommé « Angry Brigade » dans un contexte de tension sociale généralisée tel que l’Angleterre n’en a plus connu depuis ; au moment où dans toute l’Europe et sur tous les continents, de nombreux groupes s’organisent pour attaquer physiquement les structures du capitalisme et un certain ordre moral que les années 68 n’auront pas réussi à mettre en pièce. D

Le trou de la serrure

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Le trou de la serrure

Une vie passée devant le trou de la serrure n’est-elle pas bien misérable ? Une vie à lorgner ce que les autres font, à écouter en cachette ce que les autres disent. Une vie de voyeurs, qui s’évertuent à arracher des morceaux d’autres existences, de personnes qu’ils ne sont même pas en mesure de connaître dans leur complexité, mais dont ils violent l’intimité sans aucun scrupule. Il y a ceux qui le font derrière un buisson, ceux qui le font avec l’aide d’un micro caché, ceux qui le font planqués derrière un écran. Et il n’est pas dit que les premiers soient les pires.

La stura

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La stura

Dare la stura signifie « déboucher, enlever le bouchon et laisser le liquide s’écouler. Au sens figuré cela signifie donner libre cours aux mots, aux cris, aux injures… ». C’est l’impression qu’on a à la lecture de nombreux communiqués de condamnation et de prise de distance avec les attaques, advenues dans les dernières semaines, contre des hommes et des structures de la domination. L’impression qu’un bouchon a sauté. Comme si jusque là le refus de se différencier aux yeux de la répression, le mépris envers ceux qui veulent se faire passer pour « les bons garçons », peut-être un peu ébouriffés mais finalement bien braves, n’était pas du tout une manifestation spontanée et naturelle de son être, de son individualité, de ses choix de vie, mais uniquement une contrainte idéologique à laquelle on se sentait obligés de se plier. Une sorte de précepte abstrait, de chantage moral à supporter, souvent en serrant les dents, avec une patience mal dissimulée. Et, comme on le sait, même la patience a une limite.

Protestation devant les libertaires

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Protestation devant les libertaires du présent et du futur sur les capitulations de 1937

Un « Incontrôlé » de la Colonne de Fer (mars 1937)
 
Je suis l’un de ceux qui ont été délivrés de San Miguel de los Reyes, sinistre bagne qu’éleva la monarchie pour enterrer vivants les hommes qui, parce qu’ils n’étaient pas des lâches, ne se sont jamais soumis aux lois infâmes que dictèrent les puissants contre les opprimés. Ils m’ont emmené là-bas, comme tant d’autres, pour avoir lavé une offense, pour m’être rebellé contre les humiliations dont un village entier était victime : autrement dit, pour avoir tué un « cacique ».

La Joie Armée

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La Joie Armée

Alfredo M. Bonanno

Mettons de côté les attentes, les hésitations, les rêves de paix sociale, les petits compromis, les naïvetés. Tout le bric-à-brac métaphorique qui nous est proposé dans les magasins du capital. Mettons de côté les grandes analyses qui expliquent tout, jusqu’au plus petit détail. Les gros livres pleins de bon sens et de peur. Mettons de côté l’illusion démocratique et bourgeoise de la discussion et du dialogue, du débat et de l’assemblée, des capacités éclairées des chefs. Mettons de côté le bon sens et la sagesse que la morale bourgeoise du travail a enfoui dans nos propres cœurs. Mettons de côté les siècles de christianisme qui nous ont enseigné le sacrifice et l’obéissance. Mettons de côté les prêtres de tous ordres, les patrons, les leaders révolutionnaires, ceux moins révolutionnaires et ceux pas révolutionnaires du tout. Mettons de côté le nombre, les illusions du quantitatif, les lois du marché, l’offre et la demande.

Declaration au proces

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Declaration au proces

François Claudius Kœnigstein, dit Ravachol

Si je prends la parole, ce n’est pas pour me défendre des actes dont on m’accuse, car seule la société, qui par son organisation met les hommes en lutte continuelle les uns contre les autres, est responsable. En effet, ne voit-on pas aujourd’hui dans toutes les classes et dans toutes les fonctions des personnes qui désirent, je ne dirai pas la mort, parce que cela sonne mal à l’oreille, mais le malheur de leurs semblables, si cela peut leur procurer des avantages

Quarante

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Quarante

Il y a quarante ans, le 17 mai 1972, le commissaire Luigi Calabresi était tué devant son domicile à Milan. Le principal responsable de la mort de Giuseppe Pinelli, l’anarchiste défenestré du commissariat de Milan quelques jours après le massacre de piazza Fontana, terminera ses jours sur le trottoir de la rue Cherubini, vers 9h15 du matin. Ce n’est pas un infarctus ni un accident, mais deux projectiles qui l’ont contraint à dire adieu à sa carrière, à sa retraite et à la vieillesse. Le commissaire Fenêtre survivra en effet moins de trois années à sa victime. 


Pauvres

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Pauvres

Très souvent, on a tendance à ne prêter attention qu’à ce qui est matériel, mesurable en quantité. Ainsi, on serait amené à considérer la misère qui règne dans cette société uniquement sous un angle de pauvreté matérielle, autrement dit, le manque de fric. Mais le capitalisme ne nous enlève pas uniquement les moyens matériels pour vivre comme bon nous semble. Il ne nous oblige pas uniquement à aller travailler ou à s’agenouiller devant les institutions de bienfaisance sociale.

Aux aspirants suicidaires...

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Aux aspirants suicidaires...

On parle beaucoup de suicide en ce moment, c’est que les temps sont durs... La restructuration du capitalisme, les licenciements de masse, délocalisations, hausse des prix des produits de consommation courante, services sociaux de plus en plus excluant etc.. On pourrait croire que le capitalisme chute, mais il ne fait que s’assumer encore un peu plus à travers la vague des suicides d’employés de France Telecom, Peugeot, Renault, l’augmentation des maladies du travail, de la consommation d’anti-depresseurs et de psychotropes pour faire passer la pilule de l’exploitation.

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