Généalogie de l’organisation informelle



Avons-nous vraiment besoin de la politique pour transformer la réalité ? Avons-nous vraiment besoin que quelqu’un nous dise, au parlement ou dans la rue, comment, quand et pourquoi agir ? Certains pensent que non.


Que l’action ne doit pas endosser les traits de la politique, avec son hypocrisie et ses mensonges. Que la vie n’est jamais affaire de parti, ni celui de l’Ordre, ni celui de l’insurrection. Qu’il existe un lien indissociable entre pensée et action, entre les moyens que nous choisissons et nos buts.

Contre toute forme de représentation politique, de domestication des désirs individuels au nom des besoins communs, une partie du mouvement anarchiste continue à se battre depuis plus d’un siècle. La partie la plus méconnue et la plus calomniée, celle qui n’entend pas entrer en compétition avec la Gauche sur la voie des compromis et des opportunismes, des convergences d’intérêts et des échanges de faveurs, des transitions et des transactions.

Des individus enragés qui veulent radicalement changer le monde sans renoncer à eux-mêmes et qui refusent toute forme de centralisme.

Conscients que les énergies d’un mouvement éruptif et bouillonnant ont tout à perdre à être contenues et dépossédées par les organisations politiques, quelles qu’elles soient, ils se fient à l’action individuelle ou en petits groupes pour tenter de bouleverser l’ordre social.

Parcourons à nouveau ici les traces de ces anarchistes, à partir des premières intuitions du lointain 1881 jusqu’aux formulations de nos jours. De la lecture de ces pages émergera le fait que, contrairement à un lieu commun assez diffus dans les milieux subversifs, la peste « individualiste », « anti-organisatrice », « informelle », n’est aucunement une dégénération de l’anarchisme.

Il s’agit d’un courant souterrain qui n’alimente aucune lumière au plafond, d’une agitation tellurique qui ne promet aucun nouvel ordre. Sa présence est imperceptible aux sens humains domestiqués par le bourdonnement de la société moderne, mais l’irruption de son désordre dans notre vie risque de mettre un terme à la civilisation qui nous étouffe.
Une possibilité qui est la raison de ce livre.


[traduite de l’italien par les soins de NonFides]